Oubliez tout ce que vous pensez savoir sur les musées ethnographiques. Le Quai Branly, c’est l’enfant terrible de la scène muséale parisienne, une institution qui navigue – parfois maladroitement, souvent brillamment – entre passé colonial et ambitions contemporaines. Niché dans un écrin végétal à deux pas de la tour Eiffel, ce musée est à la fois une merveille architecturale et un miroir complexe de notre rapport aux cultures non-occidentales.
Le Bâtiment : Quand l’Architecture Fait Son Show
Imaginez un OVNI architectural posé au bord de la Seine. Jean Nouvel, dans un élan d’audace caractéristique, a conçu un édifice qui défie les conventions muséales parisiennes. Un de ses bâtiments secondaires, le batiment Branly perché sur des pilotis comme une cabane high-tech dans les arbres, est enveloppé d’un « mur végétal » vertigineux signé Patrick Blanc. Cette façade vivante de 800 m², composée de 15 000 plantes, est devenue l’emblème du musée – même si, soyons honnêtes, certaines zones ressemblent parfois plus à un jardin négligé qu’à la jungle luxuriante promise.
L’architecte a imaginé un parcours qui commence dès l’extérieur, avec une rampe sinueuse qui vous élève progressivement vers les collections. C’est théâtral, c’est ambitieux, et ça fonctionne remarquablement bien. Les 30 « boîtes » colorées en saillie sur la façade nord ajoutent une touche de folie architecturale qui divise les critiques mais ne laisse personne indifférent.

L’histoire du musée
Les Origines Complexes
Le Musée du Quai Branly est né en 2006 de la fusion des collections du Musée national des Arts d’Afrique et d’Océanie et du laboratoire d’ethnologie du Musée de l’Homme. Un projet porté par Jacques Chirac, qui y voyait l’occasion de créer un lieu dédié aux « arts premiers » – terme qui fait encore grincer des dents bon nombre d’anthropologues.
L’histoire du musée est indissociable de celle du colonialisme français. Les collections, constituées en grande partie pendant la période coloniale, posent des questions essentielles sur la propriété culturelle et la représentation des cultures non-occidentales. Le musée tente aujourd’hui d’aborder ces questions de front, avec plus ou moins de succès selon les expositions.
L’Évolution du Projet
Le projet architectural a démarré en 1999, quand Jean Nouvel remporte le concours. L’ambition était claire : créer un lieu qui ne soit pas qu’un simple musée, mais un véritable centre culturel dédié aux arts et civilisations d’Afrique, d’Asie, d’Océanie et des Amériques. Le chantier, titanesque, a mobilisé plus de 30 entreprises et coûté environ 235 millions d’euros.
L’ajout du nom de Jacques Chirac en 2016 a été l’occasion de réaffirmer la vision originelle du musée : un lieu de dialogue entre les cultures, même si ce dialogue reste parfois à sens unique.
Points forts du musée
Les Collections : Un Trésor Contesté
Le musée abrite plus de 300 000 œuvres, dont seulement 3 500 sont exposées en permanence. C’est à la fois impressionnant et frustrant. Les collections permanentes sont réparties sur un plateau de 4 000 m², organisé par zones géographiques.
Les plus du musée :
– La collection d’art océanien, particulièrement remarquable
– Les masques africains, dont certains ont inspiré les avant-gardes du XXe siècle
– Les textiles précolombiens, d’une conservation exceptionnelle
Informations pratiques
Horaires :
Ouvert du mardi au dimanche, 10h30-19h (22h00 le jeudi)
Adresse :
Tarifs :
– Plein tarif : 14€ / Tarif réduit : 11€
– Gratuit pour les moins de 18 ans et le premier dimanche du mois
Accessibilité :
– Métro : Alma-Marceau (ligne 9), Bir-Hakeim (ligne 6)
– RER C : Pont de l’Alma
– Bus : 42, 63, 80, 92
– Parking : Saemes Quai Branly
Conseils :
– Venez le jeudi soir : moins de monde et une ambiance plus intime
– Le café du toit offre une vue spectaculaire sur Paris (et des prix tout aussi spectaculaires)
– Évitez le week-end, sauf si vous aimez jouer des coudes
Restaurants / pause :
- le Café Jacques
entrée par le jardin du musée
Horaires : Du mardi au dimanche de 11h00 à 19h00
Nos Astuces
- Commencez par la terrasse panoramique pour vous orienter
- Ne manquez pas les instruments de musique, souvent négligés mais fascinants
- Prévoyez au moins 3 heures pour une visite approfondie
- Téléchargez l’application du musée avant votre visite
Verdict final
Le Quai Branly est un musée qui dérange, qui questionne, et c’est tant mieux. Malgré ses contradictions – ou peut-être grâce à elles – il reste un lieu incontournable pour quiconque s’intéresse aux cultures du monde. Son architecture audacieuse, ses collections exceptionnelles et sa programmation ambitieuse en font un musée unique en son genre, même si la présentation des œuvres peut parfois sembler plus esthétisante qu’éducative.
C’est un lieu qui mérite qu’on s’y attarde, qu’on y revienne, et surtout qu’on en débatte. Car s’il y a bien une chose que le Quai Branly réussit parfaitement, c’est de ne jamais nous laisser indifférents.